Partager ses doutes

Entretien avec réalisé à Saint-Laurent-du-Maroni (Guyane)
et publié le .
Quand ça m'arrive, je me permets de dire clairement : "Ben, là, je sais pas quoi te répondre."

J'ai du mal à les formuler. Le doute est pas très clairement défini, pour moi. C'est plus sur le moment, où je me dis "Attends, j'ai dit ça." Alors, quand ça m'arrive, ces trois personnes avec qui j'interagis sur ces questions, je me permets de leur parler de ça clairement.

"Ben là, je sais pas quoi te répondre. Là, je t'ai dit ça, mais c'était cohérent et signifiant pour moi – j'ai un doute en te le disant. Je me rends compte que peut-être pas. Qu'est-ce que tu en penses ? Est-ce que ça te parle ou pas ? Et, surtout, t'hésites pas, s'il y a quelque chose qui t'interroge, faut m'interrompre."

Que ce soit un échange. Que ce soit pas seulement moi qui t'envoie des trucs. Moi aussi, ça me nourrit. Ça me fait du bien d'être là. Ça me comforte dans les démarches que j'ai entrepris. C'est encore un peu difficile pour moi de formuler ces doutes-là, là, devant caméra. C'est plus dans le vif du sujet où je vais essayer d'interagir avec la personne avec qui je discute.

Pour la pair-aidance, que je découvre là, pendant ces deux jours de stage, c'est quelque chose qui me motive bien. Où je pense que j'ai une place – à trouver, à créer. Moi et avec les personnes.

J'ai, sur les terrains dont je parlais au début, l'idée d'avoir un carbet de passage. Pour ceux qui savent pas, les carbets, c'est un genre de grande cabane où on accroche son hamac. Donc c'est pas forcément que touriste. Ça peut être aussi un weekend santé, pour se retrouver entre usagers et ex-usagers. À nous de trouver la formule qui nous convient le mieux et qui convient à un maximum de personnes.

C'est des projets assez ténus pour l'instant, mais c'est des choses qui commencent à bien me tenir à coeur. Pendant un moment, je regardais pas mal sur l'art-thérapie. Et je me rends compte, avec le temps – je suis intervenu avec des enfants autistes – je me suis rendu compte que le côté thérapeutique, personnellement, dans une démarche de devenir thérapeute, m'intéresse pas forcément.

Mais de faire de la pratique, déjà juste de découvrir une matière, un support, de pouvoir exprimer des choses. C'est peut-être plan-plan ce que je dis là, mais c'est quelque chose qui n'existe pas. Il y a beaucoup de vide, à Saint-Laurent-du-Maroni. De nouvelles pistes à explorer, qui moi me nourriraient beaucoup. Je crois aussi que j'aurais des choses à apporter.

David Feunteun. Jusqu'à récemment enseignant en arts plastiques à Saint-Laurent-du-Maroni, en Guyane (France).